Droit du travail : quels changements avec l’état d’urgence sanitaire contre le Covid-19 ?
Temps de travail, chômage partiel, congés : l’état d’urgence sanitaire impose au Gouvernement d’être réactif et de légiférer par ordonnances et de prendre des mesures prévues pour durer jusqu’à la fin de l’année. Visio-Avocats vous propose un état des lieux de ces mesures pour vous aider à y voir plus clair pendant cette période de confinement. Nos avocats, présents sur notre plateforme se tiennent à votre disposition pour répondre en visioconférence à vos questions ou inquiétudes.
Le mercredi 25 mars 2020 en Conseil des ministres, 25 ordonnances ont été présentées pour mettre en place l’état d’urgence sanitaire, tel que le prévoit la loi adoptée le dimanche 22 mars 2020 par le Parlement.
C’est maintenant l’exécutif qui détient des pouvoirs exceptionnels afin de lutter contre l’épidémie de Covid-19, qui nous touche tous, de près comme de loin. Parmi les premières ordonnances, trois d’entre elles viennent modifier le droit du travail durant une période qui s’étend jusqu’au 31 décembre 2020.
L’objectif principal de l’exécutif étant de limiter la réduction des effectifs des entreprises, de permettre l’accès au chômage partiel et d’offrir la possibilité aux entreprises de pouvoir disposer de la gestion de leurs salariés de manière plus libre. D’autres mesures ont également pour objet de maintenant le niveau de vie des chômeurs afin de prolonger la période de leurs droits, si ceux-ci arrivaient à la fin de cette période.
Des congés vont pouvoir être imposés
Une des ordonnances présentée par le Gouvernement permet aux employeurs d’imposer certaines dates de congés. Concernant les congés payés, les syndicats ont négociés pour que cela soit soumis à un accord de branche ou d’entreprise. C’est donc vis à vis de cette conditions que l’employeur pourra imposer aux salariés des dates de congés, dans une limite de six jours en comptant un “jour franc” de prévenance au lieu de quatre semaines actuellement. Les congés qui pourront être imposés ne concernent que ceux devant être pris avant le 31 mai 2020.
Concernant les RTT, l’employeur ne sera pas soumis à la signature d’un accord de branche ou d’entreprise. Il pourra, de manière unilatérale, modifier ou imposer les dates des RTT, les jours de repos prévus par les conventions de forfait et les jours de repos affectés sur le compte épargne-temps du salarié.
Enfin l’ordonnance précise que pour imposer ou modifier les congés, une limite de 10 jours est prévue sur une période qui ne pourra pas aller au-delà du 31 décembre 2020.
Qu’en est-il du temps de travail ?
Il s’agit là d’un point essentiel des ordonnances qui va permettre à certaines entreprises de faire travailler leurs salariés au-delà de ce qui est prévu en temps normal par le droit du travail. Il sera ainsi possible de déroger à un certain nombre de textes pour une durée et des secteurs définis.
L’intérêt est ici de pouvoir faire en sorte que les secteurs qui connaissent un accroissement de leur activité pendant cette période particulière, puissent répondre à la demande. Actuellement la durée légale du travail est de 35 heures par semaine mais un salarié peut travailler jusqu’à 48 heures par semaine, avec ces ordonnances, la durée du travail est étendue jusqu’à 60 heures par semaine pour certains secteurs.
La liste des secteurs concernés sera précisé par décret. On peut facilement imaginer que cela pourra concerner les secteurs de la logistique, des transports, de l’énergie ou encore de l’agroalimentaire ou la grande distribution par exemple.
Également, la durée du travail effectif sur 12 semaines, qui est actuellement de 44 heures, pourra passer à 48 heures. De la même manière, la durée journalière du travail pourra passer à 12 heures, ainsi le repos entre deux périodes de travail sera réduit de 11 heures à 9 heures. Il est également question de dérogations qui vont autoriser le travail le dimanche pour que certains secteurs puissent travailler en continue.
Quelles mesures pour l’activité partielle ?
L’activité partielle, souvent appelée “chômage partiel” sera aussi concernée par les ordonnances très prochainement. Ainsi, toute entreprise dont l’activité est réduite ou arrêtée va pouvoir mettre tout ou partie de son personnel au chômage partiel. Les salariés recevront alors une indemnité horaire égale à 84% de leur salaire net horaire et de 100% concernant les salariés au SMIC. Concernant les salariés à temps partiel, l’ordonnance les inclus aussi.
L’entreprise devra faire sa demande auprès de la DIRECCTE (Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). D’après la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, l’absence de réponse de la part de la DIRECCTE sous 48h vaudra accord.
Des entreprises qui n’étaient jusqu’alors pas éligibles à ce système, telles que la SNCF ou la RATP mais aussi les entreprises qui ne sont pas établie en France, mais dont les salariés sont régis par le droit français, comme EasyJet, selon l’exemple du ministère du Travail, le seront maintenant, dans des conditions qui restent encore à préciser.
L’ordonnance va aussi accorder le chômage partiel aux emplois à domicile, aux VRP, aux assistantes maternelles ainsi qu’aux cadres en forfait-jours, qui n’y avaient jusqu’à présent par le droit.
Le projet de loi de finances rectificative prévoit que ce dispositif devrait coûter 8,5 milliards d’euros, dont les deux tiers seraient à la charge de l’Etat et le tiers restant serait pris en charge par l’Unedic.
Les primes exceptionnelles défiscalisées
Le Gouvernement prévoit la possibilité pour les entreprises de différer le versement au titre de l’intéressement de la participation et la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat. Ces éléments instaurés suite aux pressions des “gilets jaunes” sont maintenus mais l’entreprise aura jusqu’à fin décembre 2020 pour les verser aux salariés.
Qu’en est-il des chômeurs ?
Pour “maintenir le niveau de vie des chômeurs”, une ordonnance et un décret sont consacrés à l’assurance-chômage. Ces mesures vont permettre de prolonger les droits des chômeurs qui arrivent en fin de droit depuis le 12 mars 2020. En effet, les chômeurs qui ont reçu leur allocation en mars, la recevront aussi en avril, même en cas d’épuisement des droits.
La période du confinement ne sera pas comptabilisée dans le calcul du salaire journalier de référence qui détermine le montant de l’allocation.
- La réforme de l’assurance chômage qui était prévue pour le 1er avril, a été reportée par le Gouvernement.
- Concernant les intérimaires, le chômage partiel leur sera accordé jusqu’à la date de fin de leurs contrats, que le contrat soit rompu par l’entreprise ou non.
- Les saisonniers auront aussi le chômage partiel jusqu’au 15 avril et au-delà si cela été prévu dans leur contrat.
- Enfin, concernant les intermittents du spectacles, pour ceux dont le réexamen des droits été prévu en mars, n’aura pas lieu et cela jusqu’à la fin du confinement.
Quand seront applicables ces mesures ?
L’objectif d’un ordonnance est d’agir vite, elles sont donc applicables dès leur publication, mais doivent faire l’objet d’une ratification par le Parlement, le cas échéant elles seraient caduques.